Voici, à travers un exemple "simple", de quoi répondre à de fréquentes questions sur le calcul des
conditions d'oscillation et de l'amplitude de l'oscillation.
Soit le schéma de base suivant comportant un amplificateur de gain négatif et un réseau déphaseur :
Figure 1
Le système oscillera si les conditions de barkausen en module et en phase sont réalisées, c'est à dire A.B =1 où A.B est la fonction de transfert en boucle ouverte.
1° Comment constituer le réseau déphaseur ?
L'amplificateur de gain négatif apporte une rotation de phase de 180°. Le réseau déphaseur doit donc lui aussi apporter à la fréquence d'oscillation, une rotation de 180°. Il faut donc au minimum, un réseau du 3ème ordre (phase évoluant de 0° à -270°) avec une cellule résonnante LC. Le schéma suivant (Colpitts) répond par exemple, à cette contrainte.
Figure 2
La réponse fréquentielle du 3ème ordre, et qui dépend de la valeur des composants, a l'allure suivante :
Figure 3
2° Conditions d'oscillation
On suppose l'amplificateur idéal avec une impédance de sortie nulle, une
impédance d'entrée infinie, un gain Av = Vs/Ve et deux saturations symétriques
dues aux tensions d'alimentation
Figure 4
2.1 Conditions d'oscillations intuitives (à la louche Ph.DONDON ! )
A priori et sans calcul, la fréquence d'oscillation est
donnée par la fréquence centrale du circuit résonant. Pour déterminer ce
circuit, on se regarde les capacités vues par l'inductance L. Ici, L "voit"
un condensateur équivalent Ceq composé de C1 et C2 en
série.
La fréquence de résonance sera donc :
A la résonance, le circuit se comporte comme un "bouchon résistif" de forte valeur devant Rf. C1 et C2 forment alors un pont diviseur capacitif. La tension de sortie obtenue sur C2 sera égale à Vs = -(C1/C2).Ve (attention au signe -). Le gain de l'amplificateur Av devra donc être supérieur à C2/C1 en valeur absolue.
2.2 Conditions d'oscillations calculées
la fonction de transfert du réseau
s'écrit :
soit après calcul :
(1)
La fréquence d'oscillation est obtenue en annulant la partie imaginaire car
le gain doit être réel à la fréquence d'oscillation. Il vient :
En reportant dans la formule (1) on obtient le gain du réseau à fo :
(attention au signe -)
Si Rf n'influait pas sur les conditions d'oscillations, alors pourquoi serait-elle là ?
Sans Rf , le réseau ne serait plus de 3 ème ordre mais du second. Atteindre un déphasage de 180° deviendrait alors utopique… Par ailleurs, n'oublions pas que l'amplificateur n'est pas parfait : sa résistance d'entrée Re et la résistance équivalente de L forment un atténuateur avec Rf qui joue donc sur la fréquence d'oscillation et les conditions de gain. En tenant compte de Re on obtient alors :
et le gain du réseau
Notons que Re a pour impact de décaler
légèrement le "point -180°" vers une fréquence supérieure à fo. La fréquence d'oscillation f'o est donc fort
logiquement légérement supérieure à fo. De même l'atténuation apportée par Rf
et Re rend le gain du réseau légèrement inférieur à
Go. Il faudra donc le compenser en conséquence.
2.4 Stabilité en fréquence
Le taux de stabilité SF s'exprime de façon générale par :
Le taux de stabilité peut varier de quelques unités (oscilateur à pont de wien) à quelques dizaines de milliers (oscillateur à quartz).
Plus le réseau sera sélectif, (ou plus la phase "tourne rapidement" autour de la fréquence d'oscillation), plus grande sera la stabilité en fréquence de l'oscillateur. Dans notre cas, en regardant la courbe de phase de la figure 2, avec Re supposée infinie, on comprend (avec les mains !) qu'il existe un choix optimum des composants pour maximiser SF c'est à dire pour que la rotation de phase autour de fo soit aussi rapide que possible
En supposant Re non infinie, et toute chose étant
égale par ailleurs, on montre que le taux est maximum pour : Re.C2 = Rf.C1. Plus
Re et Rf seront grandes,
moins le réseau sera amorti et plus grande sera sa sélectivité.
3° Calcul de l'amplitude des oscillations
Cette amplitude est limitée par les non linéarités de l'amplificateur, en premier lieu les saturations dues aux tensions d'alimentation. En première approche on peut assimiler la courbe de réponse de l'amplificateur par des segments de droite comme indiqué en figure 4, mais une approximation par une tangente hyperbolique est un peu plus représentative de la réalité (figure 5) (cas de la paire différentielle par exemple).
Sans modélisation des non linéarités, il est impossible de prévoir l'amplitude du signal.
Figure 5
On peut considérer cette limitation comme un léger écrêtage. Cela se traduit par de la distorsion : ainsi, le signal obtenu ne peut jamais être un sinus pur d'où le nom d'oscillateur quasi sinusoïdal.
Cette distorsion est d'autant plus importante que le gain de boucle est très supérieur à 1. Pour cette raison, on fait en sorte que le gain soit en juste supérieur à 1 (de l'ordre de 1,1 à 1,2) autour de l'origine (Ve faible) pour faciliter le démarrage de l'oscillateur. On s'arrange ensuite pour que le gain passe en dessous de 1 avant d'atteindre l'écrêtage "dur" par les alimentations.
En négligeant l'impact de Rf et Re, et en considérant les composants passifs idéaux, on peut estimer l'amplitude du signal par la méthode suivante (dite du premier harmonique):
a) On assimile la fonction "tanh" par
son développement polynomial :
y= tanh (x) = x-x^3/3+e(x^5)
b) On identifie la courbe de réponse de l'amplificateur :
Vs = a.tanh(b.Ve)
Ve-> + l'infini alors Vs-> -Vcc
Ve-> - l'infini alors Vs-> +Vcc
la pente à l'origine vaut en valeur absolue Av (>0):
D'où :
a = - Vcc
b = Av/Vcc
On peut alors écrire la fonction en boucle ouverte Vbo/Ve sous la forme :
c) On pose Ve= a. sin(wo.t) et on calcule l'expression de Vbo en négligeant les puissances supérieures à 3 (pour simplifier)
en développant le sinus cube, il vient :
soit :
d) On exprime alors que la condition A.B =1 doit être satisfaite pour le "fondamental" wo du signal
Soit :
ou encore :
Application :
En prenant un gain de boucle Av. (C1/.C2) = (1+k) avec C1=C2 et k =10% pour assurer un démarrage de l'oscillateur comme indiqué avant, il vient :
soit numériquement : a = 0.52.Vcc
Cette valeur peut être estimée graphiquement en cherchant le point y = x sur la courbe tangente hyperbolique. Il s'agit là que d'une estimation car ne tenant pas compte de la distorsion…
Il peut être évalué en faisant le rapport de l'amplitude de l'harmonique 3 à celle du fondamentale en reprenant le résultat obtenu au point c) de la méthode. Il s'agit naturellement d'une valeur minimale du taux. Pour obtenir une valeur plus précise, il suffit de développer la formule avec un ordre supérieur.
Lorsque le taux de distorsion est fondamental pour le concepteur, on peut avoir recours à un controle automatique de gain comme dans l'exemple ci-dessous (oscilllateur à pont de wien) : pour remplir les conditions de barkahausen, le gain de l'amplificateur doit être en théorie exactement égal à 3. On ajuste le gain autour de cette valeur en permanence, en mesurant la tension crête de la tension de sortie et en la comparant à une valeur de consigne. Le transistorJFET agissant comme une résistance variable fonction de l'écart entre la valeur mesurée et la valeur de consigne Un correcteur P.I assure la stabilité du système.
4° Commentaires
attention : Tout ceci n'est
qu'une première approche : la réalité est beaucoup plus complexe car de
nombreux éléments parasites mal connus interviennent. La prise en compte de ces
éléments rendraient vite les calculs très compliqués...
Rien ne remplace donc une bonne expérimentation...